Démystifier la douleur chronique

Pour comprendre le phénomène de chronicisation de la douleur, soit la persistance de la douleur au-delà du temps nécessaire à la guérison, il est essentiel d’aborder le concept de douleur, tout simplement. 

La douleur aiguë

  • C’est un processus qui se produit dans le système nerveux, dont l’objectif est habituellement la protection du corps.
    • Par exemple, si l’on touche à un objet trop chaud, le corps perçoit la présence d’un danger dans les récepteurs du doigt, qui envoient un signal au cerveau par les nerfs, qui sera perçu comme une douleur par le cerveau. Celui-ci envoie ensuite un signal aux muscles de retirer le doigt, pour éviter de se brûler.
  • Normalement, nous ressentons une douleur lorsqu’il y a présence d’une lésion ou d’une blessure des tissus du corps. Habituellement, la durée de la douleur sera associée à la sévérité de la blessure, donc une blessure plus grave, comme une fracture, causera de la douleur plus longtemps qu’une blessure mineure, comme une coupure avec une feuille.
  • Cette douleur nous influence à être plus prudent avec la région du corps qui est lésée, nous évitant ainsi d’aggraver la blessure. Lorsque la blessure est guérie, la douleur s’estompe et le corps reprend son fonctionnement normal. 

Comment la douleur devient-elle chronique ? 1,2,5

  • Si le signal de douleur envoyé au cerveau persiste trop longtemps, certains changements sont observables dans le système nerveux :
  • Certaines zones du cerveau, telles que les zones associées aux émotions (système limbique, cortex préfrontal) et qui ne sont pas utilisées pour la douleur en temps normal, vont commencer à percevoir des signaux de douleur.
  • Un stimulus habituellement indolore peut activer les voies de la douleur, dû à l’abaissement du seuil de perception de la douleur.
  • Il y  a une diminution du fonctionnement des fibres descendantes du cerveau qui servent habituellement à inhiber le signal de la douleur.

Donc, à la suite de ces changements, il y a présence de douleur même s’il n’y a plus de blessure des tissus, puisque le signal de la douleur est hypersensible, et donc, biaisé.

Pourquoi certaines personnes souffrent-elles de douleur chronique alors que d’autres, non ?

Les facteurs de risque de chronicisation de la douleur sont multiples.4 Nous retrouvons, entre autres :

  • une douleur aiguë sur une longue période de temps ;
  • une prédisposition génétique à développer de la douleur chronique ;
  • un ensemble de facteurs environnementaux (peu de soutien moral de la famille, environnement de travail stressant) ;
  • un ensemble de facteurs personnels (tendance à l’anxiété, peur de la douleur, inactivité, tabagisme).

L’importance du mouvement dans la douleur chronique

  • Chez une personne sans douleur, l’activité physique permet d’augmenter la production d’endorphines, une hormone qui amène une sensation de bien-être et qui augmente le seuil de la douleur, donc diminue la sensation douloureuse.
  • Ce même phénomène a été démontré chez les individus souffrant de fibromyalgie, de douleurs cervicales chroniques en lien avec un « whiplash », de syndrome de fatigue chronique, d’ostéoarthrite et d’arthrite rhumatoïde, même malgré la présence de douleur chronique. 3
  • D’autres études ont démontré que l’utilisation des muscles non douloureux chez les individus souffrant de douleur chronique musculaire crée ce même phénomène de diminution de la sensation douloureuse. 3

Chez les individus souffrant de douleur chronique, l’exercice est donc conseillé, mais doit être entrepris de façon graduelle et adapté à la condition de chacun.2 

Un physiothérapeute peut vous guider dans cette démarche et vous accompagner dans ce retour progressif au mouvement, tout en combinant l’exercice avec une approche thérapeutique manuelle.

 

Références :

1- Apkarian AV, Hashmi JV, Baliki MN. (2011) Pain and the brain: Specificity and plasticity of the brain in clinical chronic pain. Pain, 152: S49–S64

2- Nijs J. et al. (2011) How to explain central sensitization to patients with ‘unexplained’ chronic musculoskeletal pain: Practice guidelines. Manual Therapy 16 (2011) 413-418

3- Nijs J. et al. (2012) Dysfunctional Endogenous Analgesia During Exercise in Patients with Chronic Pain: To Exercise or Not to Exercise?

4- Rashiq S, Dick BD. (2009) Factors associated with chronic noncancer pain in the Canadian population. Pain Res Manag, 14(6): 454-460

5- Van Wilgen PC, Keizer D. (2012) The Sensitization Model to Explain How Chronic Pain Exists Without Tissue Damage. Pain Management Nursing, 13(1): 60-65.

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